Bullet Train

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[Cinéma] – VF – Interdit au moins de 12 ans – De David Leitch

Avec Brad Pitt, Joey King, Aaron Taylor-Johnson
2h 07min / Action, Thriller

Synopsis et critique : Télérama

C’est la friandise inattendue de l’été : en fait du blockbuster sous stéroïdes raté, du nanar puissamment musclé que nous annonçait la rumeur, voilà que déboule sur les écrans un faux film d’action et une vraie comédie, teigneuse et drôle. Un véritable jeu de massacre en huis-clos, sanguinolent pour de rire, mené tambour battant à 300 km/h, filmé certes avec efficacité, mais aussi ce qu’il faut de classe, d’amusement et de détachement pour qu’on se laisse porter avec délices. La succession presqu’ininterrompue de « gunfights » et de « punchlines » (comme dit la critique de maintenant, soucieuse de voir ses « quotes » reproduites en caractères gras sur les affiches promotionnelles des films), est assez jouissive avouons-le, les répliques étant souvent plus mortelles que les coups de feu – et surtout mises au service d’une morale malicieuse qui promeut davantage l’art du Zen (et de l’entretien des motocyclettes) qu’elle ne fait l’apologie imbécile de la violence aveugle.

Ancien cascadeur et chorégraphe devenu spécialiste du cinéma d’action déjanté et décalé, David Leitch, déjà aux commandes des surprenants Deadpool 2, Atomic blonde et John Wick, a mis du style et du saké dans son moteur. Adaptation d’un polar de l’écrivain Kōtarō Isaka, Bullet Train tire le meilleur profit de son exotisme japonais : une énergie de manga emporte ce film coloré et graphique qui se joue presque entièrement à bord d’un TGV du réseau Shinkansen, un modèle de fantaisie inspiré par le véritable Hayabusa, le plus rapide de tous. À bord prennent place un aréopage de tueurs à gages, à commencer par le plus poissard, le plus cool et le moins armé, surnommé Coccinelle, les flingueurs Citron et Mandarine, la jeune Prince, fille de la Mort Blanche, chef russe d’un gang de yakuzas, et aussi le Loup et le Frelon, tous en mission élimination… Des personnages que le scénario distribue comme des cartes à jouer, dans une grande partie de Cluedo sur rails où le spectateur sera bien servi.

Toutes les leçons du meilleur cinéma de divertissement ont été retenues pour mettre en images cette relecture joyeusement débridée du Crime de l’Orient-Express, mâtinée des Dix petits nègres (pardon, Ils étaient dix), réduits à sept (et il n’y a pas de ce côté un suspense intense, de cette armada de tueurs enfermés ensemble à leur insu, bien peu verront la gare de Kyoto à la fin du voyage). Notamment celles de Tarantino lorsqu’il maniait le sabre nippon (Kill Bill), et celles dispensées sur des rails fous par les visionnaires coréens aux commandes de Snowpiercer et Dernier Train pour Busan. S’il n’invente rien, David Leitch se révèle doué pour orchestrer la surenchère : comme pris de vitesse, son Bullet Train se mue en un film catastrophe cartoonesque, tout en démêlant avec un plaisir acrobatique les fils d’une intrigue burlesquement labyrinthique – avec en prime une décontraction dans laquelle on n’est pas loin de reconnaître l’influence des frères Coen. Destinée à rendre le spectacle juvénile et sympathique, l’habituelle distanciation comique trouve ici un interprète d’exception en Brad Pitt. Affublé d’un bob, d’une veste verte, et de lunettes à grosses montures, l’acteur s’amuse comme un gamin à endosser le rôle de Coccinelle, et se bat comme un héros, toujours risible, toujours crédible. Un numéro de première classe.

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